Ecrire à Mitterrand !*
Non il ne s'agit pas d'une lettre écrite à François Mitterrand mais d'un atelier d'écriture s à la médiathèque Mitterrand de Sète !
Atelier d'écriture Cut-up Publié le Samedi 29 Octobre 2022 à 12h43 Le Vendredi 04 Novembre 2022 de 17h00 à 19h30 Avec Fabrice Melquiot. "Héritée du mouvement dada comme de certaines pratiques surréalistes, la technique littéraire du cut-up a été expérimentée dans les années 60 par les auteurs Brion Gysin et William Burroughs.
Photo Sylvie
Atelier à la médiathèque François Miterrand avec Fabrice Melquiot, performer de théatre, écrivain, poésie, chansons ……
Pour nous faire connaître la méthode du cut up, Fabrice Melquiot nous lit des passages de façon très rapide, dans deux livres de poésie et le journal midi libre.
A nous de récupérer un ou pas plus de trois mots au fil de cette lecture à toute vitesse.
Sur toute la liste, nous retenons 15 fragments de textes.
Puis avec une personne de préférence pas connue, on doit se raconter une histoire, un souvenir qui ne durera pas plus de 3 mn.
On ne racontera pas l’histoire, seulement l’évoquer sous trois formes possibles ; un récit, un dialogue, un monologue.
Les mots soulignés sont les fragments retenus.
Muette comme une enfant subjuguée, elle est toute admiration face à lui.
Pris d’inspiration, il improvise et joue comme un Dieu.
Elle est fascinée, scotchée, sans pouvoir dire un mot. Singulière situation qu’elle vit.
Elle sait qu’on l’attend, elle ne peut s’arracher.
Elle est comme sur une autre planète.
Seule, elle danse, légère, aérienne, telle une feuille qui s’envole.
Dans sa tête, un bouquet de douceur.
Je marche vers elle, elle ne me voit pas.
L’air est brûlant. Je m’approche et lui crie dans l’oreille de nous rejoindre.
Tous les autres l’attendent.
Pas de réaction. La pluie commence à tomber, mouillée jusqu’aux os, elle semble se réveiller, regarde autour, d’elle, nous reconnaît.
Enfin nous la récupérons. Nous roulons durant des heures.
Arrivés dans le quartier, elle veut bien nous raconter.
Françoise
Vieille carcasse
- Putain de bagnole !
- Qu’est-ce que tu t’escrimes à réparer cette vieille carcasse !
- Vieille carcasse, c’est marrant ce que tu dis.
- Pourquoi ?
- Ça m’fait penser à ma mère.
- Pas sympa pour elle. J’la connais peu mais quand même, pense que c’est elle qui a mis les fondations de ta vie…
- Ou qui allume un feu !
- Pourquoi tu dis ça ?
- Moi quand je suis avec elle, je brûle à l’intérieur. J’ai l’impression d’être prisonnier, dans une boîte. Impossible d’exprimer un autre avis que le sien. Une peur tribale m’envahit quand elle me fixe avec cet air dur et je redeviens muet comme l’enfant que je ne suis plus pourtant.
- J’la vois pas comme ça ta mère. Elle a l’air gentille et avec moi, c’est un bouquet de douceur.
- C’est stupéfiant ta représentation et en même temps, ça ne m’étonne pas. Elle sait très bien dissimuler aux autres, derrière un visage pur, cette dureté, cette fermeté cette intransigeance qui prime à la maison.
- T’exagères pas un peu ?
- Non pas du tout. Tu sais ce qu’il a été obligé de faire mon père ?
- Non.
- Inventer des histoires pour aller voir, en cachette, le tour de France à la télé chez ma sœur.
- Pourquoi ?
- Ma mère, ce petit soleil que tu crois voir, est un océan de dureté. Elle refuse depuis toujours toute incursion de la télé dans son foyer. Et pas la peine de discuter. Je suis sûr qu’à 90 ans ce sera pareil tellement elle est têtue.
- C’est pas grave ça !
- Pas grave, mais pour tout c’est comme ça.
- Vous avez essayé de discuter de vos envies, de vos désirs ?
- Pas récupérable, je te dis. Elle, quand c’est non c’est non et pas la peine de sortir la grande cavalerie d’arguments. C’est un non sans équivoque.
- Et ton père, il supporte ça ?
- Ben oui, mon père, il a la douleur muette et il l’aime tellement qu’il accepte tout. Bon assez parlé d’ma mère, ça m’fout l’cafard.
- Alors cette bagnole, on regarde c’qu’elle a… Elle va pas s’réparer toute seule !
- T’as raison, on s’y colle !
- On appellera ta mère si on n’y arrive pas, elle aura sûrement un avis !
Michel Marincchio
Ecrire à Malraux !*
*Non il ne s'agit pas d'une lettre écrite à André Malraux mais d'un atelier d'écriture auquel nous avons été conviés à la médiathèque Malraux de Sète !
Ce sont les Automnales à Sète. René Frégni est devenu un habitué.
Vendredi 11 octobre, il a animé un atelier. Il a donné quelques phrases en guise d'incipit. Il a cité Giono, Camus, lui et c'est parti pour 45mn !
Inducteurs :
- « Comment-suis-je arrivé dans cette ville face à la mer ? »
ou :
- Giono : « où je vais personne n’est jamais allé, personne n’ira, le pays est vierge et il s’efface derrière mes pas. »
ou :
- « J’attends la nuit et je me glisse dans le parc. »
Des textes
Malo
5 heures venaient de sonner.
Accoudé sur un muret de la jetée, j’observais un chalutier qui rentrait au port. Il était poursuivi par une nuée de mouettes. Leurs cris couvraient tous les bruits de la ville. Je rêvais, quand, soudain, je m’interrogeais : Comment étais-je arrivé dans cette ville face à la mer ? »
Je cherchais et ne trouvais aucune explication.
Moi le parisien, j’avais enfourché ma moto et pris des routes au hasard. Elles m’avaient mené ici, à la mer !
Avais-je au fond de moi un itinéraire enfoui qui avait guidé mon choix ?
Étaient-ce les inscriptions sur les panneaux ? Les paysages ?…
Aucune réponse…
Je me retournais et apercevais au bout de la jetée un panneau lumineux qui déroulait les activités de la semaine. « Cette semaine à Saint Malo... »
Mon cœur s’accéléra, c’était ça. Saint Malo ou ...plutôt Malo qui m’avait attiré jusqu’ici. Malo, cet ami, ce frère que je n’avais jamais vu. J’avais pourtant vécu neuf mois en sa compagnie, ressenti les mêmes angoisses, entendu les mêmes voix mais l’on ne s’était jamais réellement rencontré. J’avais l’impression de le connaître, il vivait en moi, mais il n’était pas là. Il me manquait.
Il n’avait jamais poussé de premier cri. Il était resté muet, désespérément muet à la naissance. Le seul cri dont je me souviens est celui de ma mère quand on lui a dit : « Nous sommes désolés, mais nous n’avons rien pu faire ».
Malo m’avait abandonné, laissé seul face à la souffrance de mes… de nos parents.
Je l ‘avais haï ce frère qui avait détruit, saccagé notre vie, tous laissés avec un grand trou dans le cœur.
Je fermais les yeux et des larmes se mirent à couler, inondant mon visage. Des larmes, des torrents de larmes, impossibles à maîtriser. Trente ans de chagrin, de manque qui sortaient. La digue avait lâché.
Alors, un homme s’est approché :
- Ça va Monsieur ? ...Vous avez besoin d’aide ?
Aucun son ne sortait. L’homme se rapprocha encore, d’une voix douce essaya d’autres mots. Plus il essayait de me réconforter, plus je pleurais.
Il me prit dans ses bras sans honte, sans retenue. C’était la première fois, mes parents n’avaient jamais pu, la douleur avait tué la tendresse.
Ces bras amicaux, désintéressés m’apaisèrent. J’ai relevé la tête et dit : « merci »
Il m’a souri. Mes larmes se sont arrêtées et j’ai parlé, parlé. Moi, le taiseux, j’ai raconté ma vie à cet inconnu, là, sur la jetée du port de Saint Malo.
Il a écouté sans rien dire, m’a laissé déverser mes peines.
La fraîcheur commençait à tomber. La lune pointait le bout de son nez. Je m’arrêtais, reprenant un peu mes esprits, le dévisageais ...
- Excusez-moi, je vous ai retardé et … et on ne s’est même pas présentés. Je m’appelle Martin et vous ?
- Moi, c’est Malo.
Michel
‘Où je vais personne n'est jamais allé,
personne n'ira, le pays est vierge
et il s'efface derrière mes pas.’
Jean Giono
Parce que je suis unique mes pas incertains me conduisent là où personne n'est jamais allé de son pas sûr et précis. Pour moi, pas de paysage conquis mais l'aventure, la découverte (pas au coin de la rue : c'est trop loin).
Le paysage est vierge, les souvenirs m'aident à poser quelques cailloux qui me servent de support pour accrocher des fragments, des lambeaux de mots évocateurs qui en s'imbriquant vont composer un nouveau paysage ; mon pas incertain est générateur de pages blanches, de pages vierges donc de nouvelles découvertes.
Je parcours ce nouvel espace imaginaire qui s'efface derrière moi. C'est un espace de jeux à créer, un espace mouvant, toujours renouvelé car à peine figé par les mots il disparaît déjà et, de mon pas incertain, j'aborde déjà la prochaine page blanche, terre vierge de mon avenir.
Amour funeste
17h13 : Les voitures parasitent de leurs Klaxons la rue. Ils ont fini de travailler, ils rentrent chez eux, dans leur pavillon de banlieue, leur 120 m2, leur deux pièces, leur chambre de bonne. Des étudiants trainent, respirent enfin l'air du dehors. Ils s'en fichent qu'il soit pollué, ils sont libres dans leur jeunesse. Les poussettes prennent possession du parc. Les rires éclatent, les cris jaillissent, les manèges tournent.
J'attends.
17h36 : Les mères rentrent leurs bambins un peu plus fatigués. Tant mieux, ils dormiront tôt ce soir.
L'air est frais. L'automne est là.
17h45 : C'est l'heure des joggeurs ; l'heure des chiens en laisse, ou pas, lachés dans le parc. Ils vont chier, pisser où bon leur semble. Ça gâchera un peu le plaisir des habitués du jardin demain. Mais les propriétaires des cabots s'en fichent.
J'attends.
18h30 : Les lumières dans la rue s'allument. Les fenêtres aussi : les dessins animés ou des journalistes s'animent sur les écrans bleus, des enfants font leurs devoirs, les cuisines se parent de buée, les chiens jouent dans les salons.
Le parc ferme ses grilles rouillées.
J'attends ... la nuit.
La noire, la profonde, l'angoissante, assis dans ma voiture. Quelle heure peut-il être ? Qu'importe, je sais que c'est le moment. Le plafonnier s'allume et s'éteint aussitôt que je ferme doucement ma portière.
Le parc est à moi.
Je sais comment y pénétrer sans me faire voir.
Voilà. "Salut le parc !", "Salut l'homme !" Nous chuchotons, par précaution. Maintenant il m'appartient. J'avance dans les allées crissantes ; pas d'obstacle, mes pas me guident. Comme les senteurs des arbres, des dernières fleurs mourantes. La musique de la cascade, là-bas au fond, m'appelle.
Enfin, j'y suis. Je suis là où je vais chaque soir quand la nuit tombe. A l'aveuglette, je devine la margelle de la fontaine où chute la cascade. J'en fais le tour, m'enfonce dans le bosquet de sorbier rouge, épais, branchu.
Comme toutes les nuits depuis un mois, je la retrouve. Elle ne porte plus de parfum, je l'aime sans odeur. Je m'allonge contre elle, elle a toujours froid. Alors je pose mon manteau sur son corps recroquevillé. Mon bras droit enlace ses hanches maigres et de ma main gauche, je caresse sous mon paletot, ses seins durs. Je lui murmure des poèmes, lui raconte ma journée à attendre, dans ma voiture, la nuit. Je ferme les yeux, comme elle. Nous dormons l'un près de l'autre.
Demain, avant l'aube, je partirai. Je remettrai mon manteau, et mettrai, sur elle, feuilles rousses et petites branches. Elle demeurera, sereine, jusqu'au lendemain soir.
Peut-être, peut-être pas ...
Je remonte dans ma voiture.
J'attends la nuit, encore et encore, jusqu'à ce qu'un jour ...
Sylvie
Seuls ensemble
Comment-suis-je arrivé dans cette ville face à la mer ? Vous voulez vraiment savoir ? Bien sûr, je peux vous le raconter, mais quel intérêt ? Pourriez-vous comprendre mes motivations les moins rationnelles ? Pourriez-vous comprendre mon être profond, celui que je ne comprends pas moi-même. Vous connaissez « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », « Où je vais, personne n’est jamais allé, personne n’ira, le pays est vierge et il s’efface derrière mes pas. Là où je vais, là où je pose mes pieds, c’est une autre terre, inconnue de vous. Ce sont d’autres herbes, d’autres insectes que j’écrase ; vous ne les verrez jamais comme moi, mais rassurez-vous, vous en verrez et en écraserez d’autres que personne ne connaîtra jamais. Le paysage s’efface derrière nos pas, vierge pour ceux qui viendront après nous. Celui que je foule, en moi il se fixe, et je le transforme à ma guise selon mon humeur, selon ce que je veux tâcher de faire vivre et ressentir à mon futur lecteur, selon ma fantaisie.
Depuis quelques temps j’attends la nuit pour me glisser dans le parc ; oui, je me suis découvert nyctalope. Rien ne m’excite tant que de voir dans le noir, en particulier ce qui ne veut pas être vu. Par exemple des couples enlacés dans les fourrés, contre un arbre ou, à l’autre bout du parc, en lisière de l’autoroute. Les esseulés furtifs cherchant un assouvissement éclair. Je vous y ai surpris l’autre jour, vous étrangliez un très jeune homme à genou le nez contre votre braguette. Vous ne le trouviez pas assez appliqué. Il a été découvert mort étranglé avec une ceinture de cuir. Etourdi que vous êtes, vous avez couru agrippé à votre pantalon après votre forfait. Je l’ai ramassée avec toutes vos empreintes les vôtres et celles du pauvre gosse.
Je ne ressens rien de ce que vous avez vécu, mais je suis l’indispensable témoin oculaire, bien que ne voyant que d’un œil, et je possède l’arme du crime. Moi seul peux vous faire condamner, aller où vous ne voulez pas aller, sauf peut-être pour animer un atelier d’écriture.
Viviane
Retour
Aujourd'hui maman est morte ou plutôt cette nuit. Son cœur s'est arrêté de battre. Je l'ai trouvée, dans son lit, au petit matin, allongée sur le dos, les yeux ouverts, le visage serein. La couette pourpre remontée jusqu'au menton était lisse comme neige.
Maman, elle, elle était froide, froide et blanche comme neige.
Le docteur est venu constater son décès. J'ai refusé qu'on l'emmène. Je ferai comme pour papa. Un point c'est tout. Encore une fois, Gérard ne dira rien. Quand on ne s'inquiète pas pour les vivants on n’a pas le droit au chapitre pour les morts.
J'ai ouvert la porte-fenêtre qui donne sur le parc. Les arbres sont blancs. Maman n'a plus à craindre une mauvaise grippe.
J'ai jeté une poignée de graines, sur la terrasse, pour les oiseaux. Maman aimait tant les oiseaux du parc. J'en ai même fait tomber quelques-unes sur la moquette de la chambre et sur la couette, jusque sur la main offerte de maman.
Assis dans le fauteuil, immobile, j'ai observé longuement les plus hardis qui s'approchaient. Leurs pépiements m’ont bercé…
Je me suis réveillé. Une fauvette picorait la paume figée de maman. J’ai cru un moment qu’elle faisait la morte, maman, pour ne pas effrayer l'oiseau. Puis je me suis souvenu... J'aurais pu prendre le téléphone pour prévenir les autres. Mais non ! Je veux rester seul avec elle.
La nuit est tombée. Je n'ai rien mangé de la journée. Je me fais un sandwich et me glisse dans le parc. Mes pas s'impriment sur la neige au milieu des empreintes-brindilles laissées par les oiseaux.
Je m'enfonce dans l'obscurité du sous-bois jusqu'à la tombe de papa, tapie sous le cèdre. C'est là que 10 ans plus tôt je l'ai enseveli.
Au passage je prends, dans la cabane, la pioche et la pelle.
Là-haut, la lune déchire les nuages. Dans l'ombre des branches alourdies par la neige, je découvre le chantier : la neige, la terre ont été soulevées, repoussée loin de la tombe. Dans le trou, le cercueil et son couvercle béant. Je me penche. Le corps de papa a disparu.
Mes mains de chiffon lâchent les outils. Titubant, je rebrousse chemin. Des traces de pas se mêlent, aux miennes, inversées. Parmi celles des oiseaux.
Avant de rentrer dans la chambre, machinalement, je tape mes chaussures pour en détacher la neige. Les deux lampes de chevet sont allumées.
- Il y a quelqu'un ? Gérard ? C'est toi ?
Je pose ces questions que je sais vaines. Si je compte bien, mon frère n'a pas mis les pieds dans la maison depuis douze ans.
Seuls les oiseaux me répondent.
Je lève les yeux vers le lit.
À côté du corps de maman, papa est là, étendu, qui lui tient la main.
Les oiseaux picorent son corps putréfié.
Mô
Ecrire à Mitterrand*
*Bon, là, c'est pareil que pour Malraux !
A l'occasion des Automnales de Sète, René Frégny nous a fait l'immense plaisir d'animer un atelier d'écriture à la médiathèque François Mittérand.
Atelier du samedi 29 octobre 2018 avec René Frégni
Né le 8 juillet 1947 à Marseille, René Frégni a déserté l'armée après de brèves études et vécu pendant cinq ans à l'étranger sous une fausse identité. De retour en France, il a travaillé durant sept ans comme infirmier dans un hôpital psychiatrique avant de faire du café-théâtre et d'exercer divers métiers pour survivre et écrire. Depuis plusieurs années, il anime des ateliers d'écriture dans la prison d'Aix-en-Provence et celle des Baumettes. Il a reçu en 1989 le prix Populiste pour son roman Les chemins noirs (Folio n° 2361), le prix spécial du jury du Levant et le prix Cino del Duca en 1992 pour Les nuits d'Alice (Folio n° 2624), le prix Paul Léautaud pour Elle danse dans le noir (Folio n° 3576) en 1998, et le prix Antigone pour On ne s'endort jamais seul (Folio n° 3652) en 2001.
Proposition : phrase prise lors de la discussion de départ et arrangée.
« J’ai pris une feuille blanche, un stylo, j’ai commencé un voyage ».
ou
« Rendez-vous »
Le voyage continue
J'ai pris une feuille blanche, un stylo, j'ai commencé le voyage... quel voyage? Vers la mémoire, le rêve, l'émotion ?
Tout se mêle mais la mémoire de mes pas légers s'efface - car il fut un temps où ils furent légers, il fut un temps où ma robe virevoltait, caressait mes mollets...
C'est au printemps que je regrette le plus cette sensation qui était si "normale" que je n'y prêtais pas attention...
Maintenant, il me reste le rêve...
Rêver de revenir en arrière? Non, me rêver telle que je suis ? Riche de mes expériences passées, de mes voyages...
Le tissu ne virevolte plus, seul l'esprit continue le voyage, cherche à suivre le mouvement de l'instant.
Sylviane
A ce soir !
— J’ai pris une feuille blanche, un stylo, j’ai commencé un voyage.
— Quel voyage ? Me dit -elle en sortant de la salle de bain. Elle s’était enroulée dans une serviette trop petite. L’eau coulait de ses cheveux, le long de son dos et tombait en gouttes sur le lino.
— Un voyage vers la mémoire, le rêve, l’émotion peut être ? Lui dis-je.
Elle a fait la moue, comme à chaque fois que je lui parle de mon envie d’écrire. Je l’ai regardée partir vers l’armoire avec cette démarche claudiquante si particulière.
Je l’aime tel qu’elle est . Sans doute cette différence m’a toujours plu.
Son corps, ses mains longues, sa légèreté d’être. Son corps est tout en rondeur, sa peau fine et diaphane, sa sensualité exubérante.
Je suis retourné à la cuisine. Le thé est froid. Je me suis assis, face à la feuille blanche. Le stylo noir attendait.
Mon voyage avait commencé dans ma tête. Je savais qu’elle était ma « destination ». Ce que je voulais lui dire.
Elle est descendue en s’aidant de sa canne, est passée devant moi.
— A ce soir !
La porte s’est fermée, son parfum est resté.
J’ai pris la feuille blanche, le stylo noir. J’ai écrit les premiers mots.
Sylvie
Pierre et Pierre
- Rendez-vous !
Le cercle se resserre. Ils sont pressés entre le sable et l’eau. Ils ont encore leurs armes dans la main. Inutiles. Elles ont craché toutes leurs munitions, là-bas, dans le petit bois, pour peu de résultat. Un poursuivant a été touché. Il a porté ses mains à la poitrine, il a grimacé, s’est effondré sur le tapis d’aiguilles de pins. Il a poussé un râle.
- C’est moi qui l’ai eu ! a crié Pierre avec jubilation.
- Non, c’est moi. C’est ma balle qui l’a flingué, a répondu l’autre Pierre, celui qui porte un pantalon de treillis.
Ce n’était pourtant pas le moment de se chamailler. Fallait filer et plus vite que ça ! Et l’autre con qui perdait ses godasses à tout bout de bois !
D’ailleurs, le macchabée s’était relevé comme si de rien n’était et s’était relancé à leur poursuite, avec les autres. Les deux Pierre avaient entendu leur course se rapprocher. Ils étaient si nombreux qu’ils rendaient impossible la fuite par la route. Restait que la solution de la plage.
A leurs pieds, un crabe. Un énorme crabe qui se promène sur le sable mouillé. Pierre, voudrait bien l’attraper, le retourner pour voir si c’est un mâle ou une femelle. Sa mère serait contente s’il ramenait une grosse femelle à la maison.
- Ce sont les meilleures, au moins il y a quelque chose à manger dedans !
Pierre, quand il voit sa mère avaler cette bouillasse jaune tirée de la coquille, il a envie de vomir. Lui, il ne mange que la chair blanche des grosses pattes.
Pierre, celui qui porte ces putains de tongues qui l’ont empêché toute la journée de courir vite, regarde aussi le crabe qui touche son petit orteil.
- Il va me pincer, ce con ! Allez, Pierrot, on plonge !
- Mais je sais pas encore très très bien nager…
- On s’en fout ! On a pied jusqu’au bout de la digue. Après on monte sur les rochers et on est sauvés.
Pierrot hésite encore mais les méchants se rapprochent :
- Rendez-vous !
Pierrot se retourne vers les vagues qui se lèvent comme pour le choper et l’emporter au loin.
- Et merde ! lâche-til levant les mains. Je me rends, je veux pas me noyer.
- T’es qu’une mauviette, Pierrot ! Ok les gars, on se rend, le jeu est fini. On a perdu à cause de lui !
Pierrot se met à chialer. Mais il a une idée. Entre le pouce et l’index, il attrape le crabe, le retourne.
- Si t’es encore mon copain, Pierre, je te le donne, c’est une femelle.
Mô
Photos de Sylvie
Médiathèque André Malraux de Sète -
La caravane des mots
Atelier d'écriture avec le derrnier Cantastori : Anthony Greco
La Médiathèque André Malraux de Sète nous propose quelques images de l’atelier d’écriture « du rythme & les mots », animé par Anthony Greco, ainsi que du spectacle autour de la tradition poétique sicilienne
Les textes
Le matou et la lady
Gni – oNG - noi – niaaNG
Gni – oNG - noi - niaaNG
Oussama le Géant
A mordu méchamment,
En haut du minaret,
Le gros matou malais
Qui hurla en miaulant :
MiaoU Miy a Ha hA
MiaoU Miy a Ha hA
Le gros matou malais
A dû, pour s’échapper,
Sauter du minaret
Sur le quat’quat’ anglais
De Lady Wimbledon.
Rong roNG Ron g roNG
Rong roNG Ron g roNG
V’la l’moteur qui s’emballe
Les ressorts s’font la malle
Et la lady éclate
Oh my god ! What a cat !
Et c’est la foutue panne !
Dilang d iLaNg DiLanG
d iLaNg Dilang Di - LanG
Mô